Article 1

Manifestation de l’énergie dans les arts martiaux internes chinois

 


 

Dans les Arts martiaux internes (Taiji Quan, Bagua Zhang), la notion de « Qi » (ou « chi ») est largement diffusée, avec des abus participants au discrédit de ces disciplines. Nonobstant l’existence de ce Qi, que l’on retrouve dans la médecine traditionnelle chinoise ou encore le Qi Gong, il est néanmoins important, dans une pratique martiale, de s’intéresser aux principes physiques (muscles et articulations), bien entendu remis dans une logique Yin/Yang, afin de faire jaillir cette force dite « interne » (Fa Jing). Dans cette perspective, quels mécanismes articulaires de base mobiliser dans la pratique des arts martiaux internes ? Voici quelques pistes données par des experts pour les disciplines du Bagua Zhang et du Taiji Quan. La recherche personnelle des sensations et l’expérimentation, dans une pratique sérieusement encadrée, reste le meilleur moyen de progresser, mais le point sur la théorie n’est pas négligeable.

 

  1. M obilisation des chaînes articulaires dans le Bagua Zhang

 

 

 

  • Maître Zhang Quanliang1: « En taiji quan comme en bagua on utilise l’alternance yin/yang. La grande différence vient du fait que cette dynamique spéciale part des hanches dans le taiji quan, alors qu’elle part d’abord des déplacements des appuis (les pieds) dans le bagua. Pour le bagua, on utilisera les hanches qu’au moment de la frappe, pas pour les déplacements. »

 

 

 


 

  • Maître Liu Yongchun2 :« Q. : comment la hanche initie-t-elle le mouvement ?

 

R : La hanche impulse le mouvement car elle précède la marche. Par exemple, si je veux tourner à droite, ma hanche tourne d’abord vers la droite, puis c’est le pied qui s’aligne. Imaginez une toupie qui resterait bien verticale (alignement terre-ciel), mais qui tournerait à droite ou à gauche. En bagua, au niveau des hanches, c’est le même fonctionnement. Mais ce n’est pas tout, il faut aussi unir les 3 niveaux du corps : le haut, le niveau moyen et le bas. Ces trois niveaux se meuvent en unité. On dit que l’intérieur et l’extérieur deviennent un. »

 

Commentaires : A priori, deux affirmations semblent se contredire, dans les deux passages qui précèdent, sur l’ordre d’utilisation de l’articulation de la hanche et des pieds, puisque l’un des experts évoque d’abord le rôle des pieds et l’autre de la hanche. En réalité, tout dépend du moment auquel on fait référence dans la pratique. Dans la marche en cercle, en terme d’impulsion les pieds jouent un rôle majeur et peuvent lorsque l’on a commencé par donner une direction à la marche être considéré comme moteur premier. Par contre, si l’on change de direction, la hanche donnera l’orientation avant les pieds. Les deux explications se complètent.

 

 

 Mobilisation Taille/hanche dans le Taiji Quan

 

  • Chen Weiming 3: « Relier haut et bas ». L’énergie prend racine dans les pieds, est émise à partir des jambes, est gouvernée par la taille et se manifeste dans les doigts.« Relâcher la taille »4: La taille est le gouverneur de tout le corps. Si l’on parvient à relâcher celle-ci, alors les pieds ont de la force et les membres inférieurs sont solides et stables. Les transformations du vide et du plein sont réalisées à partir des rotations du bassin. C’est pourquoi il est dit : « le centre de commandement se trouve dans la taille ».

  • Cheng Manching5 : « Yua-k’ua est l’association de deux régions contiguës : les anciens traités de médecine chinoise définissent yua (les reins) à partir du point vital ming men, point situé en regard du nombril, au niveau des vertèbres lombaires.Il sépare le tronc en deux parties : la partie située au-dessus est appelée bei (dos ou lombes) ; la partie située au-dessous est appelée yau.Par k’ua (le bassin), on entend le bassin, les aines, les hanches et le bas-ventre ».

 

  • Yang Jwing Ming6 : la taille, les hanches et les cuisses.

 

 « La taille et les hanches ont une importance toute particulière pour les applications martiales du tai chi chuan. La taille est le volant qui sert à diriger la neutralisation des attaques adverses et l’émission du jin. Elle doit être détendue, et les hanches comme en position assise, de sorte que le bassin soit plat et le bas du dos droit. Cette position permet à vos mouvements d’être agiles et vifs. Lorsque vous bougez ou vous déplacez, votre taille doit demeurer à la même hauteur par rapport au sol ; monter et descendre la taille ne peut que perturber votre racine. […]Le rôle des hanches et des cuisses est de relier la taille aux jambes, où est généré le jin. Pour transmettre le jin à la taille, les hanches et les cuisses doivent être détendues et stables... ».

 


 

 

 

1 Energies n°9 oct/nov 2007, p.18

 

2 Energies n°5oct/nov 2006, p.36

 

3 José Carmona, Questions et réponses sur le taiji quan, Le Courrier du Livre, p.130

 

4 José Carmona, p.129

 

5 Cheng Man-Ch’ing, La nouvelle méthode d’apprentissage du Tai chi Chuan, Le Courrier du Livre, p.13

 

6 Yang Jwing-Ming, « Le style yang, Enseignement approfondi de la forme classique », Budo Editions, p.171-172